Christian FERRER

" Feu et joie " : Le recueil de notre poète Christian Ferrer commence par le chapitre « Enfant ». Dans cette partie, la répétition de vers donne d’emblée une ambiance de conte où le caniveau est rivière et un bateau de papier un frêle esquif dans lequel on embarque pour vivre une aventure où « l’on voit des enfants tutoyer l’infini ».
Dans la seconde partie, « Femme », on devient une flamme avec les premiers émois d’une main que l’on frôle et d’un baiser furtif, aboutissant à une ode à la poésie, « sorcière des couleurs », « bijoutière des mots » et « orfèvre de la langue ». Puis viennent les « Chagrins », la possession, le dédain, le mépris, la douleur, quand on est plus que « l’ombre d’un rêve »…
Mais le « Temps » reprend le gouvernail, plutôt la « chair du Temps » qui palpite en nous pour que la joie demeure ! Ce temps repousse les maux dans les ténèbres pour vivre dans la lumière, où « les mots sont des baisers qui nous effleurent ».  Âme » est l’avant-dernier chapitre, une âme à préserver par l’attention à l’autre, la générosité, la liberté et l’humilité. Christian Ferrer finit son recueil par deux traductions des sonnets de Shakespeare et un poème en rêve de Dylan Thomas, mettant en évidence la beauté des images, l’élégance et la profondeur de ces auteurs majeurs.

                                                                                                                                                    Eric Jacquelin

 

Chagrins

Tous les chagrins du monde en nos cœurs amassés
Depuis la nuit des temps remontent en silence,
Pailletant chaque instant de la petite enfance,
Et marquant l'avenir au sceau lourd du passé.

Nous pleurons les chagrins qui n'ont pas été dits,
Les grands déchirements, les chagrins étouffés,
Les gros chagrins d'enfants toujours inconsolés
Et tous les cœurs brisés aux détours de la vie.

Injustice, abandon, mutilation du cœur,
Qui n'a un jour connu ces blessures stridentes
Qui figent tout notre être en sa chaleur aimante
Et le laissent pantois, glacé dans sa candeur ?

Le chagrin, la douleur, la détresse profonde
Qui pèsent sur chacun gonflent le lourd fardeau
De Celui qui en nous, semblable au Porteur d’eau,
Sur ses épaules prend la souffrance du monde.

Il est notre Âme-source, en Lui nous sommes Un,
En Lui nous partageons toutes joies, toutes peines,
Par Lui nous savons tout des souffrances humaines,
La souffrance du monde est au cœur de chacun.

                             Christian Ferrer

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